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Interview de Tahnee Perrot Ramirez : L'intégration des neurosciences pour un bien-être durable au travail et la gestion de l'équilibre professionnel

Interview de Tahnee Perrot Ramirez : L'intégration des neurosciences pour un bien-être durable au travail et la gestion de l'équilibre professionnel

Bonjour Tahnee, pourriez-vous nous parler de votre parcours et de votre entreprise Balanced France ?

Franco-mexicaine, j'arrive puis je reste en France pour des études en sciences politiques. Diplômée de SciencesPo, je fais mes armes chez PwC dans la santé publique, avant de devenir responsable des opérations dans l'incubateur social de Make.org, j'y accompagne une vingtaine d'entrepreneurs. En parallèle de mon début de carrière, je me forme à l'accompagnement des parcours de soins grâce aux outils psychocorporels où je découvre neurosciences et neurobiologie appliquées, avec le Dr. Coudron, fondateur de l'IDYT lié à la faculté de médecine de Paris 7. Très vite, je croise expertise et outils dans ma vie de salariée et dans l'accompagnement individuel d'une dizaine de dirigeants.
De cette expérience naît une conviction profonde : la gestion de l'équilibre de notre santé physique et mentale au travail est une véritable compétence professionnelle. La majorité des individus peinent à reconnaître et à articuler leurs besoins essentiels, qu'ils soient physiques ou psychologiques. D'autant plus dans un environnement professionnel. En structurant la méthode Balanced at work et son collectif d'experts, j'accompagne désormais entreprises et dirigeants à comprendre leurs besoins physiologiques et psychologiques essentiels, à savoir les adresser seuls, collectivement, en autonomie ou avec un soutien compétent. Enfin, nous les accompagnons à agir efficacement et à mettre en œuvre des leviers concrets pour faire de l'équilibre un pilier de la réussite collective. Ainsi, nous défendons une co-responsabilité entreprise / salariés sur les enjeux de prévention des 4B (bore out, brown out, blur out et burn out). Depuis 2023, ce sont plus de 600 professionnels en Europe qui ont été formés à cette méthode. Incubé à Station F, Balanced cherche en tant qu'entreprise à mission à avoir l'impact le plus large possible auprès des entreprises de toutes tailles.

Comment définiriez-vous les neurosciences appliquées au bien-être au travail et comment expliquez-vous leur utilité à quelqu'un qui n'en serait pas familier ?

Si les neurosciences ne sont qu'à leurs débuts et qu'il existe beaucoup de fausses idées à leurs propos, les données existantes nous permettent déjà de beaucoup mieux comprendre nos enjeux du quotidien, nos réactions, nos difficultés à changer, nos émotions, ... mais aussi à découvrir notre potentiel d'évolution. Nous n'avons pas à subir la manière dont fonctionne notre système nerveux, nous pouvons apprendre à l'accompagner en particulier pendant les périodes d'intensité professionnelle et/ou personnelle.
Ainsi, je définis les neurosciences appliquées à l'équilibre professionnel comme l'utilisation des connaissances scientifiques sur le fonctionnement du cerveau et du système nerveux dans son ensemble face aux enjeux quotidiens de la vie professionnelle. Nous développons ainsi une véritable culture générale sur nos besoins essentiels puis une capacité à adresser nos besoins biologiques et psychologiques en conscience plutôt que de lutter contre eux. C'est comme passer d'une conduite en tout-terrain à une route parfaitement adaptée à votre véhicule. Il y aura toujours des routes moins confortables, mais vous connaissez bien votre véhicule et le chemin sera tumultueux, mieux maîtrisé. Vous saurez aussi solliciter plus rapidement en connaissant mieux vos limites.

Quel a été le moment décisif qui vous a conduit à incorporer les neurosciences dans vos programmes de bien-être au travail ?

En accompagnant des dirigeants sur des enjeux de santé physique et mentale, il était essentiel d'apporter des connaissances concrètes et basées sur la science. Bien plus qu'une connaissance anatomique, c'est bien l'introduction aux neurosciences qui engagent ces profils à vouloir creuser, approfondir et appliquer les conseils et pratiques découvertes ensemble. Comprendre ce que l'on sait du fonctionnement du cerveau (tout comme c'est limite) est un espace de curiosité et d'engagement sans équivalent pour parler de santé au travail.

Pourriez-vous nous raconter une expérience transformatrice que vous avez vécue en travaillant avec des entreprises comme PwC ou General Electric ?

Prenons l’exemple de Général Electric qui connaît depuis plusieurs années une réorganisation profonde. L’équipe que j’accompagnais était au cœur de cette transformation, sous tension et, devait réussir à collaborer efficacement avec une équipe répartie en France, Italie, États Unis et Espagne, sans oublier la richesse de cultures présentes au sein de l’équipe (Mexique, Indonésie, EUA, UK, Italie, …). Le séminaire Balanced at work avait pour but de leur apporter des clés pour gérer cette période d’intensité à l’échelle individuelle et collective. Après avoir creusé nos besoins physiologiques et psychologiques essentiels, nous avons creusé comment les adresser en période d’intensité dans un contexte multiculturel. À travers des ateliers d’intelligence collective, ils ont construit une charte de fonctionnement intégrant des règles d’organisation, de reconnaissance des profils comportementaux différents (DISC), et de communication (CNV) permettant une gestion plus fluide dans une période d’intensité et un plus grand respect des besoins biologiques de chacun. En simple : on arrête de serrer les dents et on commence à gérer intelligemment cette période. Chacun a par ailleurs identifié les leviers manquants à son organisation personnelle (sommeil, adaptation de l’alimentation, compléments pour soutenir le système nerveux, intégration d’exercices psychocorporels de régulation du système nerveux, outils de priorisation).
`Au bout de quelques semaines de mise en œuvre, avec une démarche réellement incarnée que le manager, c’est sans appel : la période reste intense mais on la vit mieux, on arrive à se donner une place et mieux communiquer nos difficultés pour sortir. Aussi, on a réussi à identifier des petits sas de décompression / rechargement entre chaque pic d’activité pour une meilleure gestion de l’énergie. Enfin, des pratiques comme les Walking meetings ont permis à chacun de mieux bouger au quotidien, s’exposer à la lumière naturelle avec des bienfaits avérés sur leur moral et leur énergie. Bref, ils ont construit une culture plus Balanced at work !

Quelles sont, selon vous, les principales barrières à l'adoption des approches de neurosciences dans le bien-être au travail, et comment les surmonter ?

Le mot bien être est largement connoté et a tendance à vu comme un « Nice to have » mais clairement pas comme une priorité face aux enjeux de croissance et performance. Quand on propose une approche par les neurosciences, des critiques peuvent venir s’ajouter : on utilise des neurosciences qui ne sont qu’à leurs débuts pour pousser à toujours plus de performance, cachée sous des arguments de bien être.
C’est tout l’enjeu de l’approche de Balanced. Nous parlons de gestion de l’équilibre plus que de bien être, et de compréhension du système nerveux pour une meilleure compréhension et gestion des hauts et des bas du quotidien. Nous poussons derrière notre méthode une vision d’une performance durable et réaliste. Nous proposons une lecture mais surtout nous accompagnons la co-construction d’une définition propre à chaque entreprise. Et non, une vision uniforme qui sert la performance à tout prix et qui prétend que les neurosciences ont réponse à tout.

Comment conciliez-vous votre approche analytique avec votre passion pour l'empathie et le bien-être dans vos programmes ?

L’un des piliers des expériences Balanced at work est leur aspects immersif. Comment vous parler de régulation du système nerveux sans vous la faire vivre ? Nous pourrons donc le plus possible des activités permettant de ressentir en direct ce dont nous parlons de manière théorique. Les professionnels repartent confiants dans leur capacité à appliquer les outils et ont vécu un moment fort, apaisant ou énergisant selon notre thématique !

Quelle vision avez-vous pour l'avenir des neurosciences appliquées au bien-être au travail, et comment pensez-vous que cette discipline évoluera dans les prochaines années ?

Je suis convaincue que la gestion de l’équilibre fera partie des soft skills clés du future du travail. Dans un monde hyper connecté, il devient essentiel de se connaître, de savoir poser ses limites, savoir adresser ses besoins essentiels pour garder sens et motivation au travail, sans risquer l’épuisement. Que l’on soit dans un métier digital ou manuel, touché de près ou de loin par l’impact de l’IA ou non, remettre notre santé physique et mentale au cœur de nos vies de professionnels est un enjeu universel qui cache un potentiel de créativité, innovation mais aussi de mieux être pour tous. Sans oublier le coût des RPS et TMS pour les entreprises et la société !

Pour plus d'informations : https://www.balanced-france.com

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